Le regard … depuis et vers l’enfance, Expériences esthétiques et poétiques de l’Art- Diplômée Laura Liliana Bianchi

La construction du regard fait son apparition dès la naissance et chaque culture donnera du sens et de la signification à ce que les bébés commencent à découvrir visuel et corporellement. Dans ce chemin je récupère la valeur fondamentale que les expériences esthétiques portent à la première enfance, en particulier, à partir des discours proposés par les Arts Visuels. 

D’abord, je veux m’arrêter sur ce double jeu du Regarddepuis l’enfance envers son entourage et depuis les adultes/les autres envers les bébés, les filles et les garçons, dans leurs premières années de vie.  

Le fait de regarder et d’être regardé nous place dans un contexte social où l’on trouve des approbations et des restrictions, mais surtout il s’agit d’un acte d’amour qui, déployé dans l’éducation, s’avère essentiel pour le développement de l’enfant.  Dans ce miroir des regards, l’image se constitue, la propre et celle des autres.

C’est ainsi que bien avant de laisser une empreinte visuelle avec leurs mains ou un outil, les bébés peuvent participer et profiter des expériences esthétiques et poétiques, à l’aide d’un adulte qui propose et accompagne ces rencontres.

              “Les prendre dans les bras pendant qu’on observe une peinture ou une sculpture, c’est le début d’une caresse au regard qui cherchera d’autres accolades avec les arts.”  

Après le temps viendra de se développer par le biais des traces, marques, empreintes, taches, qu’ils laisseront avec leurs mains ou d’autres éléments leur permettant d’accompagner leurs actions.  Ces innombrables marques sont recréées dans des variations subtiles et laissent également des traces à bien des égards.  C’est-à-dire, ce qui signifie qu’en même temps que les enfants laissent des empreintes visuelles, ces images impriment des empreintes dans leur perception. Il s’agit donc de l’inscription d’un discours visuel subjectif qui se nourrit et a besoin du regard d’un entourage stimulant et valorisant.

La capacité humaine de se-re-présenter naît également dès les premiers moments de la vie et le corps sera le symbole essentiel qui apparaîtra vers les deux ou trois ans dans des dessins, des peintures, des modelages et d’autres formes esthétiques, une parmi tant d’autres qui surgissent dans l’enfance.  Ces formes créatives évolueront avec les filles et les garçons si on leur offre des propositions éducatives en accord avec le moment et la capacité expressive de chaque individu.

C’est pourquoi, à partir de l’engagement d’enseigner dans cette première et sensible tranche d’âge, on a besoin d’un regard aimant et attentif de celui qui sélectionne de manière adéquate, offre et soutient la rencontre et l’interaction avec le fait esthétique quotidien et les expériences qui tissent les arts visuels. 

L’accompagnement à la construction sociale, culturelle, éthique et esthétique du regard, du geste expressif et de son empreinte visuelle, s’avère un droit de l’enfant et un engagement inéluctable de l’éducation en général et artistique en particulier.

Maintenant, je veux mettre l’accent sur cette vaste diversité d’expériences offertes par les différents espaces, contextes ou territoires possibles d’explorer avec nos enfants, à ce qui s’ajoute les rencontres avec les poétiques de l’art.  Tout ceci comme une invitation à profiter, découvrir, connaître et interagir de manière ludique. Je vais juste mentionner ici la valeur qu’ont quelques-unes parmi d’autres que je présente et décris dans mon dernier livre.                       

D’abord, posons le regard sur les expériences et sensations produits par le contact avec la Nature.  Aura-t-il une motivation plus attirante ou séduisante que celle d’aller à la rencontre d’une petite pierre, récupérer une feuille qui est tombée de l’arbre, tenter d’attraper un rayon de soleil qui passe à travers la fenêtre, éprouver la sensation du sable coulant entre les doigts ou apprécier l’immensité de la mer avec ses ondes et jouer avec l’eau ?

L’inépuisable capacité d’étonnement des petits guidée par ceux qui stimulent leurs recherches et trouvailles, lorsqu’ils découvrent, explorent et même collectionnent les trésors offerts par l’environnement naturel, toutes ces expériences resteront sans doute dans le registre sensible de leur imaginaire.

La nature enseigne sur la vie et ses processus en favorisant ces rencontres et lorsqu’on donne le temps nécessaire pour le dialogue visuel et corporel de chaque enfant.  C’est ainsi qu’on éduque leur perception et leur regard.  Aujourd’hui plus que jamais, il est urgent de récupérer le contact, l’interaction et le soin de l’environnement naturel car c’est l’un des piliers nécessaires pour s’ériger en une humanité meilleure.

Pour aborder maintenant les poétiques de l’art, je veux prendre l’idée d’Elena Oliveras selon qui « l’art est un symptôme de l’époque ».  Parce que la production artistique contemporaine dès le la moitié du siècle dernier a élargi les frontières de ses canons traditionnels pour intégrer différents langages dans ses œuvres, tel que le sonore, corporel, parmi d’autres.  Les Arts Visuelles ont généré de nouvelles identités :  installations, interventions, performances, proposant une relation interactive avec les spectateurs.  Ces transformations sont peut-être un défi pour la rencontre et la participation des adultes, cependant, elles se rapprochent du regard et de l’esprit ludique de l’enfant.

Une action possible dans cet immense univers est celle de partager les expériences et propositions qui récupèrent les origines de la propre culture ou celles d’autres. L’Art Textile, en tant qu’empreinte d’identité subjective et communautaire, si ancestral que contemporaine, est l’un des exemples à explorer depuis le plus jeune âge.

…l’art textile, peut-être par son origine lointaine et sa forte empreinte manuelle, a une connexion avec les enfants dès le plus jeune âge.  Une poupée en laine sera un objet qui accompagnera ses rêves sans peur.  Une pelote de laine pour faire rouler et la poursuivre en rampant ou en marchant. Un bouton pour passer un fil dans ses trous et le coudre à une étoffe pour faire une poupée… 

Il est toujours nécessaire de rechercher et connaître les artistes qui, dans ce cas, ont déployé leurs poétiques en utilisant des matériaux provenant de l’univers textile.  Nous n’en citerons que deux parmi ceux qui ont également crée des œuvres interactives et ludiques pour l’enfant. Nous parlons de Ernesto Neto, artiste visuel brésilien qui incorpore des fibres naturelles, des tissus, des sons et même des épices, pour activer tous les sens dans ses grandes installations en immersion.  L’autre est Toshiko Horiuchi MacAdam, artiste japonaise-canadienne qui dessine des parcs enfantins sur de grandes surfaces textiles tissées à la main, en tissant des réseaux multicolores, presque en apesanteur, où il est possible de se balancer, sauter, courir ou s’accrocher/se suspendre.

Le fait d’apprécier et de partager ces évènements artistiques ou d’autres du même genre avec nos enfants éveillera une attitude contemplative, un sens esthétique et un regard critique. Tout ceci se reflètera lorsqu’on intervient dans les espaces et transforme les objets de l’environnement, soit comme une activité pour les bébés, les filles et les garçons ou bien une activité partagée, en embellissant le contexte et les regards.

 Je vous remercie de m’avoir permis le partage de ces mots pleins d’images et je vous invite à toutes et à tous à profiter des poétiques de l’art comme si c’était « la célébration d’une fête », en les faisant se multiplier dans les endroits où nous habitons avec nos enfants.

LAURA LILIANA BIANCHI 

Elle est née à Buenos Aires, Argentine.

Elle est Professeur d’Enseignement Initiale, Professeur d’université et Diplômée des Arts Visuels. Sculptrice.

Auteur du document:  Recomendaciones para la elaboración de Diseños Curriculares en el Área de Lenguajes Artístico expresivos-, Ministère de l’ Education Nationale.  

Formatrice des enseignants d’enseignement initial et des professeurs des arts visuels pour l’enseignement primaire, secondaire et supérieur.

Consultante de la Direction Générale d’Enseignement Initiale. Formatrice enseignante de l’enseignement artistique de l’Argentine et l’Amérique Latine.

Auteur des articles sur l’enfance, l’éducation et les arts visuels.

Son dernier livre : Miradas, gestos e interacciones con las Artes Visuales en los primeros años, Praxis Grupo Editor, 2020, vient de recevoir la Mention Honorifique, Prix Isay Klasse au Livre d’Éducation, parmi les publiés en Argentine dans la période 2019-2021, que décerne la Fundación del Libro.

Mail: lauralilianabianchi@gmail.com

IG: @lauralilianabianchi

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